Qu'est-ce que l'ACTA ?
En théorie, et c'est ainsi qu'il est présenté, ACTA est un trait international censé harmoniser les différentes législations sur le droit d'auteur et lutter ainsi plus efficacement contre la contre-façon.
Ça c'est pour la théorie dans le monde des bisounours et c'est peut-être l'intention de départ. Mais en réalité, c'est un traité négocié dans le plus grand secret depuis environ 5 ans qui risque d'aboutir à la remise en cause de certains des plus élémentaires droits, des plus élémentaires libertés : la liberté d'expression, le droit à transmettre l'information et le savoir sans aucun obstacle, le droit de se soigner de manière décente à un coût non prohibitif, le droit de manger une nourriture saine qui n'est pas issue de manipulation génétique ... j'en passe et des meilleures.
Vous pensez que je délire, que je suis alarmistes et que je développe là une théorie du complot mal venue ? Et bien analysons un peu ce que pourrait donner l'application de ce texte.

  • ACTA met en péril la possibilité de produire et de vendre des médicaments génériques. Ceux-ci seraient désormais considérés comme des contre-façons des médicaments des grands laboratoires pharmaceutiques[1], [2], [3]. Ils risquent donc d'être détruits à tout moment par les douaniers. Ceci va donc interdire aux habitants des pays les plus pauvres de se soigner à des coûts raisonnables. ACTA est donc un danger pour la santé générale des humains. (Rappelons que soigner des gens dans d'autres pays permet de limiter la propagation des dîtes maladies, c'est ainsi qu'on prévient une pandémie)

  • ACTA instaure une insécurité juridique pour tout le monde agricole. Je m'explique : en sanctuarisant les brevets et en condamnant toute forme de "contrefaçon", d'utilisation "frauduleuse" de produits brevetés, elle interdit à des agriculteurs de vendre des produits brevetés pour lesquels ils n'auraient pas acquitter une taxe, le prix d'une licence. Le problème, c'est qu'il est absolument impossible d'empêcher ce que l'on appelle des pollinisations croisées. Un agriculteur (A) cultive du maïs non transgénique dans un champ, il n'a pas payé de licence, il est parfaitement en règle d'un point de vue moral. Son voisin (B) cultive un maïs transgénique en ayant payé la licence dans le champ juste à coté, il est parfaitement en règle d'un point de vue moral. Mais si le maïs B dissémine son pollen dans le champ de A (d'ailleurs, c'est pas "si" mais "lorsque" ... c'est ainsi que ça se passe dans la nature pour la pollinisation, c'est ainsi qu'on obtient de la diversité, aussi) et "contamine" le maïs de A à l'insu de son plein gré (joke). Lorsque A vendra ce maïs "contaminé" il deviendra alors contrefacteur puisqu'il vendra du maïs souvent à une licence qu'il n'aura pas acquitté. Sauf que tout cela c'est fait à son insu, il n'a jamais rien fait de mal. Sa seule erreur est d'avoir eu un voisin qui, lui, avait acheté du maïs breveté. Bonjour l'insécurité juridique. [4]

  • Ensuite, ACTA est un véritable danger pour la liberté d'expression et la neutralité du net (principe fondateur d'internet : le réseau est neutre, les tuyaux ne se préoccupent pas de ce qui y transite, ce n'est pas leur rôle). Avec ACTA, le printemps arabe n'aurait jamais eu lieu. En effet, ACTA oblige les FAI (fournisseurs d'accès à internet) à fournir l'ensemble des données qui transitent par les réseaux aux autorités compétentes à leur demande et notamment les identités des personnes qui postent un texte, une vidéo, une photo, un commentaire... Comme si l'État demandait à la poste d'ouvrir systématiquement votre courrier, sauf que là cela se fait de manière automatique avec une vitesse d'exécution inégalée. Cela permettra d'instaurer une surveillance des citoyens par les autorités à une échelle encore jamais atteinte (bonjour 1984 [5]. Ce point-là est dénoncé par bien des associations de défense de la liberté d'expression comme RSF [6] ou la quadrature du net [7].

  • Enfin ACTA est un danger pour le progrès scientifique et le progrès des idées. En effet, avec ACTA, impossible de citer un livre, une personne sans avoir acquitté des droits. Même dans le cadre éducatif, même pour le critiquer ou autre. Impossible d'utiliser une idée pour l'améliorer ou pour l'intégrer dans une théorie plus globale sans avoir acquitter des droits. Impossible de parler d'une théorie à des élèves sans avoir acquitté des droits. Dans ces conditions, comment transmettre un savoir ? Comment propager des idées ? Comment critiquer une théorie ou un avis ? Comment pourrais-je enseigner le théorème de Pythagore à mes élèves si je ne peux acquitter les droits ? Comment enseigner les lois de Snell & Descartes sur la réfraction de la lumière ? Comment analyser les textes de Kant ? Comment progresser ?



Pour ceux qui n'auraient pas compris mon propos (ou qui auraient la flemme de tout lire), rien de mieux qu'une petite vidéo explicative trouvée sur Youtube.


ACTA ne passera pas !